mercredi 15 février 2012

L'homme programmé - Robert Silverberg




4ème de couverture :

Paul Macy sort juste du Centre de Réhabilitation. Bien sûr, il est encore un peu perturbé, mais très bientôt sa vie reprendra son cours normal. Un nouvel appartement, un nouveau travail l'attendent, et il ne lui faudra pas longtemps avant de se faire de nouveaux amis. Paul habite l'ancien corps de Nat Hamlin, un sculpteur de génie, mais aussi un violeur en série de la pire espèce. La personnalité, les souvenirs d'Hamlin ont été effacés de manière définitive pour faire place au passé créé de toutes pièces de Macy. La société peut désormais dormir sur ses deux oreilles. Mais quelle est donc cette voix que Paul entend de plus en plus souvent à l'intérieur de son crâne?
Roman de science-fiction sombre et violent, L'homme programmé fait écho à L'oreille interne, publié à la même époque. Une nouvelle preuve de l'immense talent de l'auteur.


Mon avis :

Ma première approche de l’univers de Robert Silverberg et je ne suis pas déçue. Je suis même étonnée de constater à quel point la SF en littérature n’a rien à voir avec la SF au cinéma qui, elle, se contente de faire dans le grand spectacle à grands coups d’effets spéciaux dans l’unique but d’éblouir le spectateur. A travers les livres, je découvre d’autres facettes du genre SF, un genre qui aborde des questions d’ordre philosophique et existentiel. C’est notamment le cas avec L’homme programmé. On peut y retrouver des relents de Dr Jekyll et Mr Hyde. Certes donc, l’idée de base n’est pas particulièrement originale : deux esprits antagonistes se partagent et se battent pour obtenir l’ascendant sur un même corps. A la différence que l’un des esprits a été créé de toutes pièces.

Paul Macy est une personnalité inventée, créée par l’homme pour habiter le corps de Nat Hamlin, artiste psychopathe violeur condamné par la justice à être « effacé ». Un incident fait que la personnalité de Hamlin, censée avoir complètement disparu lors du processus de réhabilitation, resurgit et tente de reprendre possession de son corps.
De là naissent des échanges très intéressants entre les deux esprits. Nat Hamlin argue de ses 35 années de vie, de son talent, du fait d’avoir réellement vécu pour justifier sa primauté sur son propre corps.
Paul Macy est bien conscient que sa vie, ses souvenirs ont été intégralement fabriqués, qu’il n’a encore fait l’expérience de rien, qu’il est comme un nouveau-né avec déjà quelques connaissances de base. Mais pourtant, il revendique son droit à la vie.

Qu’est-ce qui définit notre existence, le fait que nous soyons humains ? Lorsqu’il s’agit de machines ou de robots, on peut avancer l’argument selon lequel nous ressentons des émotions ce dont une machine est incapable mais dans le cas de Paul Macy ? Il n’est pas une machine, il sent, ressent, mange, boit, c’est un être vivant à part entière. Mais a-t-il moins de poids en tant qu’être humain sous prétexte que son passé est faux et entièrement construit ?
Et qu’en est-il du corps en tant que tel ? N’est-il finalement qu’une interface entre l’esprit et le monde extérieur ? Un simple outil permettant à l’esprit d’interagir avec le milieu environnant ?

Robert Silverberg explore toutes ces questions sous différents aspects de façon brillante et intelligente.
Certains passages sont excellents, la construction basée sur des dialogues passionnants, le style incisif, tout contribue à la cohérence du propos et incite à la réflexion. Le récit est entièrement raconté du point de vue de Paul Macy alternant discours direct/indirect, 1ère personne/3ème personne afin d’accentuer l’effet de confusion et le flou que peut ressentir Macy à voir son esprit « parasité » sans cesse.
Les passages relatifs à la personnalité de Nat Hamlin sont bien rendus avec toute la noirceur du personnage, son côté presque « inhumain » et surtout immoral. Les scènes de sexe et de viol sont assez crues et reflètent bien le contexte d’écriture des années 70 et son côté machiste. Toutefois, on fait tellement pire de nos jours que ça n’en est pas choquant pour autant.
A la différence de Dick, pas de fin sensationnelle ici. Donc un peu déçue pour ça mais ça n’enlève rien à la qualité du récit ni à mon enthousiasme.

Un très bon roman d’introspection donc, qui fouille les tréfonds de l’âme humaine, explore la lutte du bien contre le mal, lutte qui participe finalement de notre dualité et de notre complexité.
Un roman qui se mérite car riche en réflexions. De quoi m’encourager à poursuivre ma découverte du genre.


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