« De moment en moment, la passion du moine devenait plus ardente, et la terreur d’Antonia plus intense. Elle lutta pour se dégager ; ses efforts furent sans succès et, voyant Ambrosio s’enhardir de plus en plus, elle appela au secours à grands cris. »
Pour mettre en scène le combat d’une sainteté qui se défend contre les puissances des ténèbres, Matthew G. Lewis déploie, avec un art consommé de la gradation dans l’horrible, une multitude de récits d’une audace et d’une cruauté rares.
Sade et Breton, entre autres, plaçaient très haut ce chef d’œuvre du roman gothique, dont Antonin Artaud –qui en a réalisé une « copie »- disait : « Je continuerai à tenir pour une œuvre essentielle Le Moine, qui bouscule cette réalité à pleins bras, qui traîne devant moi des sorciers, des apparitions et des larves avec le naturel le plus parfait, et qui fait enfin du surnaturel une réalité comme les autres. »
Mon avis :
Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce roman ne se focalise pas uniquement sur l’histoire d’un moine luttant contre les tentations du Malin mais se compose d’une multitude de récits tous plus ou moins du même genre ( une histoire d’amour qui finit mal) et tous plus ou moins liés. Il n’y a donc pas vraiment de personnage principal dans ce roman mais plusieurs personnages dont les péripéties nous sont relatées.
Le Moine c’est un peu une tragédie à la Shakespeare (ça m’a beaucoup fait penser à Macbeth par moments) par le style théâtral et par certaines éléments en eux-mêmes. Il ne s’agit pas seulement d’un roman gothique mais aussi d’un roman fantastique. Que les amateurs du genre ne s’enthousiasment pas trop vite. Le côté fantastique est très décevant et exagéré, on n’y croit pas une seconde. L’auteur a beau nous assommer de fantômes vêtus de blanc mais tâchés de sang ( que c’est original !), de caveaux souterrains, de crânes, d’ossements et de larves sortant de restes en putréfaction, on reste de marbre. Je n’ai rien ressenti à cette lecture, pas d’angoisse, pas de montée d’adrénaline, rien.
Quant à ce fameux moine, là aussi j’ai été déçue. Ambrosio est un moine adulé par tout Madrid pour ses vertus. Il est le champion de la lutte contre les tentations du monde. En même temps, c’est un peu facile de ne pas succomber aux dites tentations lorsque l’on n’y a jamais été confronté. Car en effet, Ambrosio a passé toute sa vie entière entre les murs d’un monastère sans jamais en sortir. Bref, il est la perfection humaine même jusqu’à l’arrivée d’un jeune moine qui se révèle être une femme et pire encore. Cet être va le conduire sur les pentes glissantes du péché. Et je ne vous en dit pas plus.
Je me contenterai de dire que la plupart des événements et rebondissements de ce roman sont le plus souvent téléphonés, et même si l’auteur nous ménage quelques passages à suspense, la majorité du récit et le dénouement final restent sans surprise aucune puisque des éléments présentés dès le début du roman nous mettent la puce à l’oreille.
Enfin, avec ce roman, les ordres monastiques en prennent pour leur grade, on sent bien la volonté de l’auteur de dénoncer les abus et la fourberie des religieux.
Donc voilà, globalement déçue car je m’attendais vraiment à autre chose. J’aurais aimé que le personnage d’Ambrosio soit plus important et que sa progressive déchéance soit plus détaillée, que ses sentiments et son combat intérieur soient plus travaillés et étudiés.
Le côté fantastique m’a semblé trop grotesque. Je n’ai trouvé aucun personnage particulièrement intéressant à part peut-être Mathilde (celle qui conduit Ambrosio à sa chute) pour des raisons que je ne peux vous expliquer sans dévoiler l’essentiel du récit.
Je pensais regarder le film sorti récemment pour comparer mais la lecture de critiques m’en a découragée. Peut-être plus tard … Quant à la version d’Antonin Artaud, j’hésite. Peut-être y trouverai-je ce qui m’a manqué ici. C’est à voir.
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