Aristote était un être de chair et de sang, et Alexandre le Grand, un adolescent plein de doutes et d'arrogance. Lorsqu'en 342 avant Jésus-Christ, le philosophe devient précepteur du futur roi de Macédoine, la relation qui s'établit est aussi singulière et enrichissante pour l'un que pour l'autre. Par ses démonstrations très concrètes sur une table de dissection, comme par ses réflexions éthiques et métaphysiques, Aristote transmet à son jeune élève la notion de «juste milieu», point d'équilibre entre deux extrêmes, si difficile à atteindre. De son côté, le fougeux Alexandre, qui désire déjà ardemment «ouvrir la gueule pour avaler le monde entier», offre des perspectives au maître peu aventureux que son père lui a choisi.
Des cahutes enfumées aux chambres du palais, Annabel Lyon lève le voile sur deux hommes illustres dont l'admiration réciproque et l'intelligence ont transformé le monde. Au fil de dialogues incisifs et souvent très crus, elle explore avec finesse et jubilation des thèmes aussi universels que la transmission du savoir, les rapports filiaux, les conflits de génération, les jeux de pouvoir.
Mon avis :
J’avais repéré ce livre bien avant sa sortie grâce au formidable travail de Ys sur le site News Book. Une fois arrivé sur les étals des librairies, je me contentais, à grand regret, de caresser sa couverture du bout des doigts en espérant qu’un jour peut-être je pourrais me plonger avec délice entre ses pages. Eh oui … mes finances ne me permettent pas souvent l’achat de livres brochés et la rentrée littéraire est, pour cette raison, toujours pour moi un moment d’intense frustration.
Mais voilà que Babelio lance son opération Masse Critique et là que vois-je ? Mon livre tant désiré est dans la liste. Ni une ni deux je postule. Et je ne postule que pour ce titre. Je le veux et je mise tout sur lui. Tant pis pour les autres titres qui m’intéressent aussi.
Quelques jours plus tard, alors que je rends visite à mon doudou d’amour, je consulte ma boîte mail et j’apprend à ma grande joie que ma candidature est retenue et que je vais donc recevoir Le juste milieu d’Annabel Lyon.
Mais pourquoi CE livre en particulier me demanderez-vous ?
Eh bien d’abord parce qu’il s’agit d’un roman historique et que je suis passionnée d’Histoire.
Et aussi parce qu’il traite (secondairement certes mais c’est toujours ça) de mon personnage historique préféré, adulé, chéri d’entre tous : Alexandre Le Grand.
Le juste milieu est en réalité une biographie romancée du célèbre Aristote se concentrant essentiellement sur la période qu’il a passée en Macédoine comme précepteur du jeune Alexandre. Le récit se fait à la première personne et nous happe totalement nous plongeant en pleine Macédoine antique.
Le style est agréable, posé, quelques fois ponctué de mots vulgaires que j’ai trouvé déplacés. Enfin … disons que mis dans la bouche des Macédoniens, je peux comprendre que l’auteur ait souhaité marquer le contraste entre le côté rustre et grossier des mœurs macédoniennes par opposition au raffinement et à la sophistication des mœurs grecques. Mais des grossièretés mises dans la bouche d’Aristote, ça m’a gênée. Mais je précise bien qu’elles sont très ponctuelles, c’est d’autant plus dérangeant car pas en accord avec le ton et le style employé dans la majorité du récit.
Je vous rassure, j’ai commencé par un point négatif mais c’est le seul reproche que j’ai à faire à ce roman.
En vérité, je l’ai adoré et ça a été un véritable coup de cœur.
Je craignais que l’auteur insiste trop sur les théories philosophiques d’Aristote mais il n’en est rien. Les passages où il donne des leçons à Alexandre sont finalement peu nombreux et très clairs et ne sont pas sans pousser le lecteur à la réflexion. L’essentiel du récit se concentre principalement sur la propre formation d’Aristote et sur sa vie privée. Le cadre évènementiel est très présent et bien expliqué, les descriptions des personnages et de leur caractère sont réalistes et en accord avec ce qu’en dit la recherche historique. J’ai apprécié que l’auteur précise en fin d’ouvrage les éléments purement fictionnels et les « aménagements » faits à l’Histoire pour les besoins du récit.
J’ai l’impression, à la sortie de cette lecture, de mieux connaître Aristote. Il n’est plus pour moi le simple philosophe que tout le monde connaît mais un être humain qui a vécut, grandit, ressentit, aimé.
J’ai vraiment apprécié de voir revivre sous la plume d’Annabel Lyon ces grands personnages de l’Histoire que furent Aristote, Philippe de Macédoine, Platon et bien sûr Alexandre. Elle a su recréer avec intelligence ce qu’ont pu être les rapports entre Aristote et le jeune futur conquérant ainsi que l’influence que le précepteur a pu avoir sur son prestigieux élève.
Un petit extrait :
« « Non, dis-je, un roi doit toujours s’exprimer clairement.
- Parler, parler, parler… J’en ai assez ! Assez des leçons, de la diplomatie, assez de rester au palais pour charmer les dignitaires de passage à la cour de mon père. Savez-vous ce que Carolus m’a appris ? Il m’a dit qu’il n’y avait jamais aucune vérité dans les mots, mais seulement dans le corps. Il dit aussi que dès qu’un personnage parle, c’est pour dissimuler ce qu’il veut vraiment dire. Les mots sont la surface sous laquelle il faut regarder. Il dit que les meilleurs acteurs sont ceux qui parlent avec leur corps, et qu’on se souvient davantage de leurs gestes que des mots qu’ils prononcent.
- J’imagine qu’il parlait du théâtre … »
J’imagine que ce qu’il voulait, c’était mettre le garçon à quatre pattes.
« Il parlait de la vie. Nous sommes tous plus vrais par le corps que nous ne pourrons jamais l’être par la parole.
- J’aimerais beaucoup voir Carolus exprimer un théorème pythagoricien sans aucun recours à la parole …
- J’ai envie de me battre. » »
Bref, je loue le remarquable travail de recherche et d’écriture qu’a effectué Annabel Lyon et je conseille vivement ce roman.
Je remercie infiniment Babelio et les Editions La Table Ronde pour m'avoir permis cette découverte.
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