Si la grue était douée de raison,
Elle diviserait les vivants
Entre les grues et tous les autres,
Indistinctement unis dans un seul bloc.
Platon
Le Politique
En son temps, Darwin choquait en montrant que l’être humain
et les singes provenaient d’un ancêtre commun.
Malgré ça, l’homme n’a eu de cesse de justifier sa prétendue
supériorité sur les autres espèces en se basant sur toutes sortes d’arguments,
aussi bien religieux que scientifiques.
Profitant de cette supériorité, l’homme a plié la nature à
sa volonté. Il ne s’y adapte plus mais la fait s’adapter à lui, peu soucieux
des autres espèces qu’il met alors en danger.
Depuis les progrès de la science ont montré que les
chimpanzés et les êtres humains partagent l’essentiel de leur patrimoine
génétique jusqu’à plus de 98% d’ADN en commun.
«L'écart génétique entre l'homme et le chimpanzé est bien
moins grand que celui qui sépare les deux espèces d'orang-outan», note le
généticien de l'évolution Pierre Darlu (Inserm).
Comment continuer alors à affirmer haut et fort que l’homme
est le seul être vivant digne de figurer tout au sommet de l’arbre des
espèces ? Qu’est-ce qui le différencie des autres ?
Dans son livre, Frédéric Lepage imagine un colloque au cours
duquel les chimpanzés sont invités à réfléchir à cette question et à décider si
oui ou non ils acceptent d’être considérés comme les égaux des êtres humains.
A travers différents personnages, Frédéric Lepage, auteur et
producteur de films documentaires, laisse s’exprimer les pour et les contre
reprenant des résultats et conclusions de recherches scientifiques validées par
Sandrine Prat paléoanthropologue chargée de recherche au CNRS.
Villeurbanne est un chimpanzé bonobo, cobaye de laboratoire
qu’on a laissé sortir afin de représenter ses congénères à la conférence. Il
est farouchement contre l’égalité avec l’homme convaincu qu’il est de son
importance et de son indispensable rôle dans les progrès de la science pour
laquelle il est prêt à se sacrifier. Il est aussi extrêmement satisfait de ses
conditions de vie. Utilisé comme mâle reproducteur, il peut féconder toutes les
femelles qu’il souhaite sans avoir à combattre un quelconque mâle dominant.
Pour lui, c’est le Paradis !
Congo est un autre bonobo venu tout spécialement du
continent africain résolu à voter pour la résolution qui ferait des hommes et
des chimpanzés des frères. Il est chargé de rédiger son discours inaugural.
C’est l’occasion pour lui de réfléchir à des arguments percutants et
irréfutables afin de convaincre l’assemblée de voter dans sa direction.
Bianga est une femelle bonobo issue d’une autre zone
géographique. Elle doit accompagner celle qui est chargée de les représenter,
l’Imprécatrice. Mais ne partageant pas ses vues, elle s’arrange pour la blesser
et prendre sa place. Elle aussi, a l’intention de voter pour la résolution.
Elle espère que cette égalité garantira la protection de son espèce.
Le colloque est l’occasion d’âpres débats entre nos
personnages. Les arguments toujours avancés par les hommes pour proclamer leur
supériorité sont passés en revue et réfutés : l’utilisation et la
fabrication d’outils ? Les bonobos aussi en ont fait preuve ! Le
langage ? Une des leurs a appris la langue des signes et est parvenue à
communiquer ainsi ! La station debout ? Les émotions ? Balayés
d’une main. Qu’ont donc les hommes de plus qu’eux à présent ?
L’enjeu est important et les esprits s’échauffent. Tentative
de corruption, manipulation, intervention d’un groupe « terroriste »
composé d’orangs-outans et de gorilles scandalisés d’être laissés de côté, ce
colloque se révèle plein de surprises et est très animé. Alternant passages
humoristiques, réflexions scientifiques et philosophiques, Frédéric Lepage
livre ici un court mais passionnant récit et invite à la réflexion. On y
apprend également beaucoup sur les bonobos et les chimpanzés. Dans la même
veine que La Planète des Singes, le fait que les animaux soient les
protagonistes principaux sollicite notre empathie ( aussi considérée comme une
prérogative humaine ) et permet un changement de point de vue bénéfique et
efficace.
Un roman original et intelligent pour remettre un peu
l’homme à sa place !
Et un grand merci à mon mari qui parvient toujours à me
dénicher des petits trésors chez le bouquiniste.
Cela semble très original :) Merci pour cette découverte !
RépondreSupprimerOui ! C'est effectivement une lecture originale, je pense qu'il y avait matière à faire plus encore mais finalement court comme ça c'est pas plus mal, on va à l'essentiel.
Supprimerça doit être passionnant. Et puis ça change des romans que l'on voit partout ailleurs ;)
RépondreSupprimerça fait du bien parfois de lire quelque chose qui sort de l'ordinaire surtout quand c'est bien fait et documenté.
SupprimerIntéressant. Je le note, d'autant plus que c'est un sujet de réflexion d'actualité dans ma famille.
RépondreSupprimerTu verras, c'est assez bien documenté pour vraiment amener le lecteur à réfléchir sur pourquoi l'homme a pu s'imposer aux autres espèces. J'ai beaucoup pensé aux pauvres orangs-outans de l'île de Bornéo pendant cette lecture.
SupprimerC'est une manière très intéressante de présenter les questions qui se posent actuellement sur le statut des chimpanzés (communs et bonobo). Merci de cette découverte !
RépondreSupprimerEt aussi une façon de rappeler que même si l'homme conserve son statut d'espèce "supérieure", il a un devoir de protection envers les autres espèces. Malheureusement, il utilise plus souvent sa force pour écraser que protéger.
SupprimerMerci à toi pour ton commentaire :-)
Le sujet me plaît beaucoup. Cela me rappelle "Les animaux dénaturés" de Vercors où la question philosophique bien que différente est proche.
RépondreSupprimerJe n'ai encore jamais lu Vercors bien que je connaisse "Le silence de la mer" pour avoir vu l'adaptation télé mais je ne connaissais pas du tout le titre que tu mentionnes. Je vais aller voir ça de plus près. Merci Claudialucia !
SupprimerJe ne suis pas certaine d'être sensible à ce point de vue, pour être honnête, mais je peux changer d'avis.
RépondreSupprimerJe te souhaite une belle année Aaliz, je vois que ton dernier billet date de décembre, j'espère que tout va bien pour toi
Difficile en effet de contester la supériorité de l'espèce humaine lorsqu'on constate au quotidien son grand pouvoir de construction et de destruction, je ne crois pas non plus que d'autres espèces atteignent ce niveau. Disons que le livre cherche plus à montrer que les espèces qui nous sont "inférieures" méritent davantage notre respect.
SupprimerJe te souhaite également une bonne année Galéa et je te remercie de t'inquiéter pour moi. Ne t'en fais pas, tout va bien, je réfléchis à ce que je vais faire de ce blog. Je le déserte de plus en plus et j'ai de plus en plus de mal à me motiver à écrire. Je me mets trop de pression je crois. :(
J'aime beaucoup lire des chses sur les théories de Darwin et les questionnements qu'ils imposent ou posent. Je ne connaissais pas ce bouquin mais de ce que tu en dis, il a l'air passionnant ! Je ne sais pas si j'aurais l'occasion de le lire mais merci pour cette découverte !
RépondreSupprimerJ'espère que tout va bien pour toi Aaliz : je te fais plein de bises !
C'est un petit lire sans prétentions mais intelligent et documenté. Merci de t'inquiéter Alison, rassure-toi, tout va bien. Je lis toujours autant mais je n'ai plus la motivation d'écrire mes avis. J'espère que tu te portes bien aussi. Bises out plein ! :-)
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