Cela fait deux mois que je n’ai rien publié sur ce blog. Je vous rassure, je vais bien et je continue à lire mais la motivation pour écrire se fait de plus en plus rare. Mais bon, je crois que vous commencez à être habitués à mes absences prolongées et injustifiées !
Je reviens aujourd’hui avec un titre d’Alberto
Moravia, auteur italien que j’affectionne beaucoup. J’avais déjà lu de lui son
célèbre roman Le Mépris massacré à l’écran par Godard et ses
acteurs pitoyables. Il a d’ailleurs été le sujet d’une de mes toutes premières
critiques sur le blog. Et je me souviens avoir été conquise par cette première
découverte de l’auteur.
Pendant l’une de mes absences, j’ai lu aussi ( mais
donc pas chroniqué) un autre de ses titres Le conformiste , roman
que j’avais beaucoup apprécié et qui traitait principalement de la normalité, de
la pression sociale et de son influence sur notre comportement et nos prises de
décision. A travers cette deuxième lecture, j’ai pu remarquer à quel point
Alberto Moravia détaillait avec minutie les états d’âme de ses personnages, il
décortique et analyse brillamment leur psychologie.
Ce troisième roman n’y échappe pas et bien qu’antérieur
au Conformiste et au Mépris, Alberto Moravia y fait
déjà la démonstration de ses talents.
Dans La Désobéissance, il met en scène
un jeune adolescent, Luca, qui refuse de continuer à obéir à tout le monde et
de se soumettre à une quelconque autorité. Rejet de ses parents, rejet de l’institution
scolaire, rejet de toute forme d’attachement matérialiste, Luca pousse son délire
anarchiste jusqu’à renoncer à la vie.
C’est amusant de faire le parallèle avec Le conformiste dans lequel le personnage
principal Marcello prend très tôt conscience de son anormalité. Et là où Luca
fait tout pour s’extraire des conventions, Marcello, lui, a le comportement
complètement inverse et fait tout comme tout le monde et tout ce qu’on attend
de lui afin de se fondre dans la masse. Toutefois, les deux romans restent bien
différents puisque La Désobéissance
se cantonne vraiment à cette période difficile de l’adolescence or que Le Conformiste retrace la vie entière de
son personnage.
En général, je n’aime pas trop les romans traitant
de la période adolescente, c’est une période qui est loin derrière moi à
présent et les préoccupations qui caractérisent cet âge ne sont plus les
miennes et ne m’intéressent absolument plus.
Mais je dois bien reconnaître qu’ici Alberto Moravia
m’a bluffée tant il décrit merveilleusement bien la violence qui peut
accompagner le passage de l’enfance à l’âge adulte.
Pour Luca, la transition s’effectuera non sans qu’il
ait risqué sa vie. Luca tombe gravement malade. Ses délires sous l’emprise de
la fièvre sont l’occasion pour Moravia de nous offrir de magnifiques pages
révélatrices de la transformation qui s’opère dans l’esprit du jeune garçon.
Mais c’est justement le fait d’avoir frôlé la mort
de si près, d’avoir presque atteint ce but qu’il s’était fixé d’être enfin
détaché de ce monde, qui va précipiter sa renaissance. Grâce aux soins zélés d’une
infirmière, Luca va découvrir l’amour charnel et ainsi, telle une chrysalide se
métamorphosant en papillon, devenir enfin un homme.
La justesse et la précision des sentiments, des
pensées, des interrogations et des réflexions de Luca découlent peut-être de l’expérience
personnelle de l’auteur qui, jeune garçon, est tombé gravement malade de la
tuberculose et aura fréquenté les sanatoriums pendant de longues années.
Outre la qualité du style et de la retranscription
des émotions et des idées, je trouve quand même un peu confuse la tentative de
faire de l’acte sexuel l’élément déclencheur de la transition garçon/homme.
Même dans le texte, je trouve que Moravia n’est pas très clair. Pour moi, faire
de la première fois le « rite de passage » est un peu cliché. J’ai l’impression
que c’est surtout la maladie de Luca le déclencheur et d’ailleurs le passage dans
le texte décrivant le rêve/délire de Luca en est l’illustration. Je n’ai pas
compris pourquoi Moravia a brusquement dévié et donné toute l’importance à l’acte
sexuel. Et puis personnellement, même si les « rites de passage »
existent dans toutes les formes de société, je pense que ce sont surtout les
événements de la vie qui font de nous une personne adulte.
Dans l’ensemble, j’ai quand même préféré la première
partie consacrée à la désobéissance de Luca , plus forte, plus violente, plutôt
que la deuxième lorsqu’il est confié aux bons soins de son infirmière, attendue
mais presque décevante par sa banalité.
Alberto
Moravia m’aura encore une fois conquise par sa maîtrise et sa capacité à
traiter un tel sujet avec tant d’acuité et d’authenticité.
Un grand merci à Célia et aux éditions Denoël pour cette belle réédition.
La Désobéissance - Alberto Moravia
Traduit de l'italien par Miche Arnaud
Parution le 24/04/2015
Editions Denoël - Collection Empreinte
192 pages
12 euros
ce roman ne m'attire pas trop (je n'aime pas trop les ado comme personnage principal, souvent naïf, excessif...) mais j'ai lu ton billet sur Bolano ( je sens que je suis capable d'aimer !). bon retour !
RépondreSupprimerMerci Maggie ! Je n'aime pas trop les ados en littérature non plus mais justement là c'est différent, on peut presque dire qu'il est déjà adulte dans sa façon de se rebeller contre l'autorité. On est loin de l'ado capricieux de base. C'est ça qui est fort chez Moravia.
Supprimereh bien oui, j'avais bien vu que tu avais disparu ! mais welcome back, et ravie de te re-lire .
RépondreSupprimerDe Moravia , je n ai lu que "l'amour conjugal" que j'ai trouvé vénéneux à souhait (j'ai été assez fascinée...)
Merci Mior ! :)
SupprimerMoravia est un auteur exceptionnel, j'ajoute "L'amour conjugal" à ma wish-list. En fait, je crois qu'il faudrait que je lise toute sa biblio ! ^^
Une belle édition en effet ! Moravia le mérite bien, c'est un de mes auteurs italiens préférés ;-) Je le trouve fascinant et j'ai dévoré plusieurs livres à la suite lorsque je l'ai découvert.
RépondreSupprimerContente de te retrouver :-)